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 [récit] L'aube des Veilleurs : histoire des Gil Celeb

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Elladan
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MessageSujet: [récit] L'aube des Veilleurs : histoire des Gil Celeb   [récit] L'aube des Veilleurs : histoire des Gil Celeb Icon_minitimeMar 22 Jan 2008, 00:08

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Si vous vous renseignez à ce sujet auprès des aventuriers que vous croisez, vous n'obtiendrez de la part de vos interlocuteurs, même auprès des plus érudits, que des haussements d'épaules. Il est une raison à leur ignorance, et le choix vous est offert de croire en ces légendes ou non : la localisation des Sylvecimes sur le continent de Tyrie, plus précisément en bordure des Lointaines Cimesfroides, est sa première défense naturelle contre d'éventuelles menaces. Peu d'humains peuvent en effet se vanter avoir foulé un jour les glaciers des montagnes du nord... il en est encore moins qui soient parvenus jusqu'aux plaines à l'ouest désormais peuplées par les Asuras, et le nombre de ceux qui en seraient revenus se compte sur les doigts de la main. Ainsi s'explique le manque flagrant d'informations à propos des Sylvecimes dans les académies humaines, ce devant quoi je ne cachai pas mon étonnement quand je parvins pour la première fois de ma vie à Ascalon. Sans aucune prétention, et comme vous tous quelque part, je suis un cas unique en mon genre. S'il existe d'autres êtres doués de parole qui entreprirent jamais le voyage qui fut le mien, je n'ai jamais relevé de leur périple des Sylvecimes jusqu'aux royaumes des Hommes, ni trace dans les bois que j'ai foulés, ni souvenir dans les mémoires que j'ai consultées. C'est pour cela que je me tiens devant vous, et l'histoire que je m'apprête à raconter ce soir n'est pas uniquement la mienne, mais aussi celle d'une contrée que la main humaine n'a jamais pu transformer, et de ceux qui veillèrent sur elles en silence.


Pour mieux vous situer le cadre de ce récit, il convient avant toute chose que je vous fasse une description des terres, ou plutôt des bois des Sylvecimes. L'appellation englobe une région de taille plutôt faible, comparée aux territoires frontaliers des Asuras, des Norns ou encore des Charrs. Le territoire s'étend le long des contreforts des Lointaines Cimesfroides au nord-est de la nouvelle colonie Asura, formée suite à l'invasion par les Destructeurs des Profondeurs de Tyrie qu'ils peuplaient autrefois. Il comprend à la fois les monts et glaciers en bordure du massif, et les forêts qui s'étendent à leur pied, plus denses que dans la plaine. Les arbres recouvrent la totalité du domaine, jusqu'aux altitudes où la végétation commence à se raréfier. Côté nature, la zone accueille un paysage similaire à celui observable dans les plaines au sud-ouest, verdoyant et sauvage. Seule la forêt très dense, peuplée d'arbres ancestraux à la taille immense, caractérise les Sylvecimes par rapport aux domaines alentours. On ne trouve pas de monstres de grande taille entre les arbres, ni de guivres dans le sol, ni même de djinns éthérés aux abords des cours d'eau. Cette forêt abrite simplement des animaux ordinaires et ne cache aucun danger, si ce n'est celui de se laisser envouter par l'impression d'une conscience environnante de la forêt.

Il existait pourtant au sein de cette étrange sérénité des êtres doués de conscience, d'un niveau d'intelligence voisin de celui des autres humanoïdes foulant la Tyrie. Ils ne se donnaient pas de nom précis, ayant peu de rapports avec d'autres formes d'intelligence, mais ils se sont toujours considérés comme les habitants des Sylvecimes. Nous les appellerons parfois êtres sylvestres. Sveltes et de taille plutôt petite, à peine plus grands que des nains, leurs traits étaient fins, leur peau d'un vert très pâle et leurs yeux brillants. Ils vivaient en communion avec la nature qui les entourait et demeuraient liés aux Sylvecimes : on rencontrait même assez souvent des unions entre un habitant et un lieu ou un arbre qu'il chérissait particulièrement. En conséquence, ceux d'entre eux capables d'entreprendre des voyages portant en dehors de la forêt étaient rares et singuliers. Les habitants des Sylvecimes ne connurent en outre jamais de velléité expansionniste, n'ayant pour unique ambition à défendre que la préservation de leurs bois. Leur affinité avec la nature leur apportait une certaine sagesse, qui par certains aspects pouvait surprendre l'observateur étranger. A la manière de l'arbre qui reste fixe des centaines d'années dans le monde en transformation perpétuelle, le peuple sylvestre n'attachait pas d'importance aux évènements politiques ou aux guerres qui pouvaient avoir lieu en dehors de son domaine. Et cette neutralité, bien qu'elle leur assura une existence plutôt tranquille avec leurs voisins, fut aussi une contribution à leur isolement, à l'absence d'informations sur les Sylvecimes aujourd'hui, et même à leur vulnérabilité, comme nous le verrons plus loin. On suppose que les archives Asura auraient un jour contenu des informations à ce sujet, mais il n'en subsiste aujourd'hui, parmi ce qui a pu être emporté pendant leur fuite des Profondeurs de la Tyrie, nulle trace.

Ainsi, on peut aisément imaginer que les habitants des Sylvecimes et leur sanctuaire vécurent dans l'ensemble paisiblement. Les Norns, habitants des montagnes, n'ont pas dans leurs meurs de s'approprier des territoires sans qu'un besoin vital ne les y pousse. Et le gibier léger des Sylvecimes leur eut paru bien frêle en comparaison avec leurs proies quotidiennes, c'est pourquoi ils n'ont jamais tenter de parcourir les bois ancestraux. Les Charrs, créatures belliqueuses vivant à l'est des Lointaines Cimesfroides, s'ils avaient eu vent des Sylvecimes et du pacifisme de leurs habitants, auraient peut-être songé à y apporter la dévastation. Mais l'obstacle qui se dressait sur leur chemin n'était pas fait que de monts ; les Charrs, quand ils osaient s'aventurer sur le terrain de chasse des Norns, devenaient eux-mêmes les proies de ces demi-géants, c'est pourquoi leurs rêves de conquête n'ont encore jamais pu porter à l'ouest des Lointaines Cimesfroides. Quand aux Asuras, la possession des Sylvecimes ne semblait pas les motiver outre mesure. A la poursuite de la connaissance, et surtout soucieux de leur propre survie, ils n'auraient su que faire de cette dense forêt au pied des montagnes, dont les habitants ne représentaient aucun danger pour eux.

Cela dit, partout, il y a des exceptions pour confirmer les règles, et les Sylvecimes n'y manquèrent pas. C'est ainsi qu'un jour où le blizzard faisait particulièrement rage en haut des cimes enneigées, un Norn perdu dans la poursuite de sa proie se mit à dégringoler le pierrier à flanc de montagne. Dans sa glissade, il essayait sans succès de planter sa hache dans le sol, ne parvenant à ébrécher que quelques caillasses dont les éclats lui striaient le visage. Heureusement pour lui, il n'avait encore rencontré aucun rocher en saillie ou autre obstacle mortel quand il arriva à hauteur des premiers arbres du domaine des Sylvecimes, où la pente se radoucissait légèrement et où la terre était plus molle. Glissant toujours sur le dos, le Norn ne perdit pas de temps pour balancer sa hache dans le sol, et une tranchée de terre retournée se mit à suivre sa trajectoire. Mais il descendait toujours ! Trop vite pour éviter l'arbre ancestral large comme deux ours qui se profilait devant lui. L'espace d'un instant, le géant put distinguer le détail des nervures de l'écorce du tronc, et ce fut sa dernière vision. Il fut davantage réveillé par l'angle de la pièce métallique qui saillait sous sa jambe, que par le bruissement de feuilles au-dessus de lui. Ouvrant les yeux, il constata que son bouclier pendait de son bras en deux morceaux, sa hache fichée dedans. Des lambeaux épars de son armure, complètement rayée et cabossée, gisaient autour de lui et il remercia la bonne fortune que la hache se fut arrêtée dans le bouclier, plutôt que dans son ventre. Il mis plusieurs secondes avant de s'apercevoir que son bras, désormais engourdi, n'avait pas cessé d'enserrer le manche de l'arme, et encore plus de temps pour finalement sentir ses côtes cassées. Son grognement de douleur retentit finalement au moment où une tête, ou plutôt une cascade de cheveux, perça le feuillage au-dessus de lui et lui jeta un regard surpris puis inquiet. Un appel dans une langue qu'il ne comprit pas retentit et il ne tarda pas à être soulevé de terre pour être installé dans un lit de branches. Il eût un dernier regard nostalgique vers son équipement en piteux état tandis qu'on l'emmenait vers l'intérieur des bois, et il sombra à nouveau dans l'inconscience.

Durant trois mois, le jeune Norn, de son nom Mudgnir, séjourna auprès du peuple des Sylvecimes et y fut bien traité. Démentant la croyance qui consiste à se représenter les grandes créatures comme pourvues d'un intellect lent, il acquit peu à peu des rudiments dans la langue des Sylvecimes qui lui permirent de communiquer avec ses hôtes. Il apprit entre autre que son hôtesse, la femme qui l'avait découvert au pied de l'arbre, se faisait appeler Eldania. Bien qu'ils ne s'en rendirent probablement jamais compte ni ne s'en posèrent jamais la question, ils étaient relativement du même âge : Mudgnir était un jeune Norn dont l'occupation du moment consistait à chasser le plus grand nombre de proies possible, afin de marquer son passage à l'âge adulte. Eldania n'était également pas encore reconnue comme adulte au sein de son peuple ; bien qu'elle fût en âge de concevoir, elle ne s'était encore liée à aucun élément naturel, évènement capital dans la vie d'un habitant des Sylvecimes. Lentement, la sympathie mutuelle née du secours apporté par Eldania se mua d'abord en une véritable amitié. Puis, progressivement, la curiosité mutuelle qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre les poussa à se rapprocher davantage, jusqu'à donner naissance à un amour authentique. Les sentiments de jeunes gens, quand ils sont purs, peuvent facilement transcender leurs différences raciales et toutes les règles sociales de leurs peuples. Cette force n'épargna pas Mudgnir et Eldania. Mais si eux deux n'y voyait absolument aucun inconvénient, ce n'était en revanche pas le cas du peuple des Sylvecimes, qui, pas dupe, constata rapidement l'évolution caractéristique de la courbe du ventre d'Eldania. On pria le Norn de quitter les Sylvecimes, après avoir soigneusement expliqué aux jeunes gens quelles conséquences allait avoir leur ignorance : liée à un homme avant de s'être liée à la nature, Eldania perdrait une partie de l'essence des Sylvecimes qui coulait en elle. Sa communion avec la terre, si jamais elle arrivait par miracle à son terme, serait dans le meilleur des cas partiellement achevée. Son pouvoir en serait affecté pour le restant de ses jours, ainsi que son honneur. Et Mudgnir, accablé de honte et de culpabilité, ne put qu'accepter son bannissement.

Des mois après ce triste dénouement, je vins au monde. Au grand dam de quelques personnes, je ne vous le cache pas : les enfants métisses des Sylvecimes ne partagent évidemment pas un lien avec la forêt aussi profond que celui des véritables habitants. Certains perçoivent cela comme une imperfection. En ce qui me concerne, ce fut le moteur de ma liberté. S'il existait des habitants qui n'auraient pas vu d'un mauvais oeil qu'Eldania perde son enfant avant sa naissance, ce n'était pas le cas de ma mère. Ayant déjà perdu son amour, son honneur et une partie de son identité, elle refusait en plus qu'on lui enlève son fils. Je ne doute pas un seul instant de lui devoir ma survie. Bien que le peuple des Sylvecimes n'était pas cruel, j'aurais sans doute dû suivre les traces de mon Norn de père hors des Sylvecimes, si ma mère ne s'était pas battue pour moi. Et nul ne pensa jamais à nous expulser tous les deux des bois. C'est ainsi qu'on lui accorda le droit de me garder auprès d'elle, jusqu'à ce que j'atteigne l'âge adulte ; alors je devrais m'en aller. Pendant les premières années de mon existence, ma mère fut mon unique point de repère dans l'univers. On interdisait bien sûr aux autres enfants d'entrer en contact avec moi. En conséquence de mon ascendance paternelle, ma croissance physique avançait nettement plus rapidement que celle des enfants des Sylvecimes. Eldania m'enseigna la langue des Sylvecimes, et m'infusa également sa connaissance de la nature. Aimé, nourri et instruit par ma mère, je grandissais dans l'ombre du peuple des Sylvecimes, et rien ne semblait vouloir changer ce train de vie.

Mais la curiosité d'un enfant d'une dizaine d'années est aussi difficile à contenir qu'un fleuve en crue, en particulier si l'enfant en question a grandi mis à l'écart de tout ce qui l'entoure, chose qui ne fait qu'attiser sa soif de connaissance. Les moments où je parvenais à échapper à la vigilance de ma mère devenaient de plus en plus fréquents, et je profitais de ces instants de relative liberté pour explorer le domaine, prenant soin d'éviter autant que possible le contact avec les êtres sylvetres. Si Eldania eut jamais vent de mes escapades, elle ne le fit jamais savoir. Il faut signaler qu'après sa déchéance, ma mère ne fut pas rejetée au sens propre par son peuple. Les années passant, des transformations physiques, ou plutôt des régressions, étaient visibles dans son apparence. Autrefois de petite taille à l'instar des autres habitants des Sylvecimes, sa croissance avait repris, sa peau se colorait différemment, et peu à peu se pigmentait. Les traits de son visage devenaient plus épais. Je ne doute maintenant plus qu'elle se dirigeait vers une forme proche de l'humaine. Sa faculté de communion avec la nature disparaissant au même rythme, Eldania ne pouvait plus participer à la plupart des activités de son peuple. En conséquence, elle passait de plus en plus de temps à l'entretien des arbres et des autres plantes, contribuant à sa manière à la conservation du domaine. Ma mère devenait une garde-forestière. Si ce tournant de sa vie avait détérioré ses liens avec ses compagnons et la nature, elle-même semblait plus forte, plus vivante, et le pouvoir perdu avait été remplacé par un autre, de nature différente mais identique dans son coeur. Elle m'inculqua l'art du tir à l'arc.

Un jour où une de ses excursions l'emmenait plus loin dans les bois qu'à accoutumée, j'entrepris moi aussi de faire ma propre exploration, à son insu. Mon chemin habituel m'emmenait vers le nord-est, en direction des contreforts des Cimesfroides, là où les habitants des Sylvecimes se raréfiaient, préférant l'intérieur des bois, où leur lien avec la terre prend toute sa mesure. Toutefois, le temps dont je disposais d'ordinaire ne me permettait jamais d'aller très loin. Cette fois était différente : ma mère avait prévu de s'absenter jusqu'au matin et je comptais bien mettre ce temps à profit. Le crépuscule nimbait l'horizon d'une teinte ambre, contrastant avec le vert de la cime des arbres, alors que je dépassai les derniers arbres ancestraux épars au pied des monts. Et c'est seulement alors je contemplais le soleil couchant que je pris la mesure de ma stupidité. Je ne pourrais pas être rentré à notre abri avant qu'il fasse nuit noire, et le sentiment de solitude m'envahit brusquement. Je n'avais pour tout équipement que mes vêtements, mon arc et quelques flèches. Le sol de la forêt était doux ; les cailloux à flanc de montagne blessaient mes pieds nus. La seule option qu'il me restait était de trouver une cavité dans la paroi rocheuse où je pourrais passer la nuit à l'abri du froid, de l'humidité et surtout de mes craintes : j'imaginais les territoires au-delà des arbres comme peuplés de monstres sanguinaires, dont seul le pouvoir sacré du domaine des Sylvecimes nous protégeait. A cent mètres de l'orée des bois, je n'en menais pas large.


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MessageSujet: Re: [récit] L'aube des Veilleurs : histoire des Gil Celeb   [récit] L'aube des Veilleurs : histoire des Gil Celeb Icon_minitimeMar 18 Mar 2008, 18:27

Le jour laissait les ténèbres envahir peu à peu le ciel tandis que j'errais à la recherche d'un semblant de tanière. Je ne demandais pas un abri très confortable, mais seulement de quoi être en sécurité quelques heures. Je repartirais dès les premières leurs de l'aube. Je tressaillis et me jetai à terre lorsque qu'une série de sifflements, de bruits secs et un choc sourd retentir à moins de cinq mètres dans mon dos. Il me fallut un instant pour me rendre compte qu'une créature venait d'être abattue. Me retournant alors, je découvris pour la toute première fois ce que les aventuriers appelaient un monstre : d'une forme rappelant de loin celle d'un humanoïde, le corps couvert d'une fourrure dense et tâchée de sang, une gueule de la même teinte et garnie de crocs acérés, deux cornes sur son front perché deux voire trois fois plus haut que le mien, la créature était impressionnante. Et hérissée d'empennages de flèches. Des bruits de pas rapides me tirèrent de ma contemplation. Des silhouettes en manteau approchèrent, arcs en main, et me cernèrent. Elles étaient à peine plus grandes que moi en taille : des habitants des Sylvecimes ? Des nains ? Je n'avais jamais vu les premiers s'adonner à la chasse, et on disait les seconds lourds dans leurs mouvements, ce qui était loin d'être le cas de ces tueurs-là, aussi souples que le bois de leurs arcs.

- Qui êtes-vous ? Ou plutôt, qu'êtes-vous, avant tout...

La voix était celle d'une jeune fille. Mais ce fut la deuxième partie de la question que ce détail qui me prit au dépourvu. En vérité, je ne me l'étais moi-même jamais posée... Cette confusion s'ajoutant à la terreur qui me tenaillait, face à ces archers de l'obscurité, je ne pus répondre que par des lambeaux de phrases, en pointant un misérable doigt sur ma poitrine. Pas le temps de m'interroger sur leur aptitude à parler le langage des Sylvecimes ; ma mère me répétait souvent qu'il ne faut pas chatouiller les gencives du loup quand ses crocs vous tiennent en respect...

- Je... Elladan. Sylvecimes...

La fille repoussa son capuchon en arrière. Humaine ? Je n'aurais su le dire. Ses yeux s'ancrèrent au fond des miens et j'eus l'impression d'être étudié sous toutes les coutures. Ses traits étaient assez éloignés de ceux des habitants des Sylvecimes, plus proches des miens ou de ceux de ma mère. Selon cette comparaison, elle ne pouvait pas être guère plus âgée que moi. Reposant son arc sur son épaule, elle m'invita, d'un geste du bras, à la suivre, elle et ses compagnons. Je leur emboitai le pas, n'ayant guère d'autre option envisageable. La compagnie progressait diablement vite. Sautant de rocher en rocher, sans le moindre bruit hormis le frottement de leurs vêtements, ils semblaient tout à fait habitués à ce milieu et connaissaient le trajet par coeur. Mes pieds nus ne pourraient supporter très longtemps le rythme imposé par leurs jambes, pourvues de bottes qui plus est. Soudain, alors que nous longions le bas d'une falaise, ceux de devant disparurent littéralement dans la roche. Saisi, je stoppai, et l'archer qui fermait la marche me heurta. Me tapant sur l'épaule avec un sourire en coin, il franchit à son tour la faille dans la roche, tout juste assez large pour laisser passer un homme. La perspective de l'ouverture était telle que j'avais du m'approcher à moins de trois mètres pour discerner le passage sur lequel elle ouvrait. Le couloir, ou plutôt la galerie, ne permettait pas le passage à deux de front. Pendant quelques minutes, dans le noir complet, je progressai à tâtons en suivant de près le garçon devant moi. Si nous ne rencontrâmes pas d'embranchements avec d'éventuelles galeries auxiliaires, le tunnel était assez sinueux et mon sens de l'orientation déclara rapidement forfait. Enfin, au bout de ce qui me sembla être une éternité, le passage s'agrandit en largeur et en hauteur, en même temps qu'apparut la première torche. Aujourd'hui encore, je pense que si on décorait l'inventeur de cet objet d'une médaille pour chaque personne a qui cela a un jour rendu service, le pauvre bougre en aurait le cou rompu. Le couloir ainsi révélé avait une toute autre allure que ce à quoi je m'attendais : une tanière d'ours, une grotte peut-être ? M'est avis que l'ours qui creusa pareil corridor, et y fixa les supports des torches, fut fort cultivé et ingénieux en son temps, et qu'il y passa la majeure partie, sinon l'essentiel, de sa vie. Contrairement au passage univoque que nous avions utilisé pour rentrer, ces couloirs appartenaient de toute évidence à une structure beaucoup plus étendue et au plan complexe. Sans hésiter, la compagnie emprunta des embranchements, que je tentai en vain de mémoriser. Notre parcours nous amena finalement dans une vaste salle où brulaient les restes d'un feu, à moitié étouffé pour le temps que durerait l'excursion de ceux qui l'avaient allumé. Un type un peu plus vieux que moi s'avança et déposa un sac de brindilles à quelques pas des flammes, en jeta quelques unes dedans d'un air revêche et partit dans un coin de la salle s'occuper de son paquetage. Je profitai de ce moment de répit pour observer mes compagnons : ils étaient sept, de tailles et carrures assez diverses. Le plus vieux d'entre eux était encore un adolescent, et le plus jeune paraissait à peine plus âgé que moi. La jeune fille, rousse, comme la lumière du feu me permettait maintenant de m'en rendre compte, qui avait pris la parole lors de notre rencontre, semblait coordonner les activités des autres. Tous conversaient en langue des Sylvecimes. Dans une petite pièce adjacente à la salle étaient rangés des arcs et des cordes de rechange, à côté d'un tas de flèches épars. Des outils et du bois sec étaient posés non loin, ainsi que des vivres. Deux garçons en ramenèrent des pièces de viande qu'on entreprit de mettre à cuire sur le feu, désormais ravivé et diffusant une chaleur confortable. Les sept compagnons s'en rapprochèrent et nous formâmes un cercle autour. Je n'avais jamais mangé ni même vu de viande de ma vie, et à en croire les regards interrogateurs des convives, je devais afficher une expression rudement curieuse.

- Fais-tu partie du peuple des Sylvecimes ? me demanda le garçon à ma droite.

- J'y vis, en effet... mais pas au sens exact du terme, répondis-je à mes hôtes, quelque peu tendus. Je vis assez à l'écart des habitants des Sylvecimes : ma mère en est originaire, mais mon père était un Norn. Je ne l'ai jamais rencontré et j'ignore jusqu'à ce qu'est un Norn...

Imperceptiblement, des soupirs de soulagement échappèrent à certains. La fille rousse détacha la première un morceau de viande cuite et entreprit de le manger. Les autres l'imitèrent. Au bout d'un instant, elle s'interrompit et prit la parole :

- Tu dis t'appeler Elladan... je n'ai jamais entendu ce nom dans la forêt. Oui, poursuivit-elle devant ma mine intriguée, nous sommes tous des habitants des Sylvecimes. Comme toi, notre origine... "impure" nous a privé des pouvoirs et affinités que possèdent les êtres sylvestres. Mais nous n'avons pas eu la chance de pouvoir rester aux Sylvecimes. En général, un enfant qui n'a qu'un seul parent originaire des Sylvecimes est abandonné. Comme ça, celui des deux parents qui risquait de perdre son pouvoir après l'union ayant engendré l'enfant, peut garder sa faculté de communion avec la nature. Toi, moi, nous tous ici, avons survécu grâce au sacrifice de nos parents. Acceptant de perdre leur don, par amour pour leurs amants ou leurs enfants, ils nous ont gardés et élevés à l'écart, le plus souvent contre la volonté du peuple des Sylvecimes. Mais ton cas est différent : c'est la première fois que j'entends parler d'un bâtard que la mère aurait été officiellement autorisée à garder...

- Vous devez faire erreur..., répondis-je dans un murmure, sur un ton manquant de conviction. J'ai toujours été pratiquement seul avec ma mère : les quelques habitants qui nous lui rendait occasionnellement visite ne se souciaient la plupart du temps pas de moi. Vous savez, on observant en cachette, j'ai vite saisi que j'étais différent des gens qui vivent ici. Leur indifférence, et l'attitude protectrice, dissimulatrice de ma mère... Tout cela aurait été différent si mon séjour avait été véritablement permis, non ?

- Et c'est là que tu fais erreur, reprit le garçon assis à ma droite. Tolérée officiellement ou non, ta présence aux Sylvecimes n'est pas appréciée par la majorité des habitants : tu es né de l'union d'une personne liée à cet endroit avec un étranger ! Tu ne disposes pas du pouvoir, pas du lien profond avec les arbres sacrés, bien que né en leur sein. Cela signifie que, malgré ton ascendance qui fait que la nature te reconnait et t'accepte sur son domaine, tu restes indétectable, invisible dans la toile des Sylvecimes, pour ceux qui la surveillent par la communion. Une erreur de la nature, et un danger potentiel, pour ceux qui y vivent. Comprends-tu ?

Mon existence m'apparut alors sous un jour nouveau, de même que la terre qui m'accueillait et ceux qui y vivaient. Avais-je un foyer, quelque part où vivre accepté en ce monde ? Que me cachait-on encore d'autre, et quel rôle ma mère jouait-elle dans tout ça ? Des questions qui ne m'auraient jamais effleuré l'esprit quelques heures auparavant. L'escapade de cette journée, la découverte de ce groupe d'enfants, marquait un tournant inattendu dans ma vie.

- Mais laisse-moi te parler davantage de nous : comme toi, encore une fois, notre ascendance est en partie norne, continua la fille. La proximité géographique que nous avons avec ce peuple l'explique peut-être. Et sans doute les Norns ressemblent-ils plus aux habitants des Sylvecimes que les Asuras, ou les Nains... Quoiqu'il en soit, nous avons été élevés clandestinement par nos mères ou nos pères, et compte tenu du danger d'être découverts à tout moment, notre vie a toujours été mouvementée. Souvent contraints de nous débrouiller seuls, nous avons fini un jour par nous rencontrer, par paires d'abord, jusqu'à la formation du groupe de sept enfants que tu as sous les yeux. Nos parents sont au courant de nos rencontres et sont rassurés de nous savoir les uns avec les autres : nous ne sommes pas des manches à l'arc, comme tu as pu le constater. Mais je doute que ta mère voie d'un bon oeil ton escapade hors de la forêt de cette nuit... A propos, le minotaure que nous avons abattu te suivait et allait sans doute t'attaquer. Si nous ne l'avions pas pisté nous-mêmes depuis l'après-midi, qui sait ce qui serait advenu... Faute d'être acceptés aux Sylvecimes, nous nous efforçons de contribuer à leur surveillance, dans la mesure de nos moyens. Car cela reste notre unique foyer. Nos parents, surement à l'instar de ta mère, ont modifié une partie de leurs êtres en nous gardant, et oeuvrent aujourd'hui pour les Sylvecimes à leur façon. Nous nous efforçons de suivre leur voie. En un sens, nous sommes tous frères et soeurs. On nous appelle les Gil Celeb : un vieux a dit un jour qu'à chaque fois qu'un être à la croisée de deux races est conçu, une étoile d'argent brille très fort au-dessus des Sylvecimes. C'est de là que vient le nom. Je suis Alustriel. Seras-tu des nôtres ?

Elle tendit la main. Des pensées tourbillonnant dans mon pauvre cerveau déjà rudement mis à l'épreuve par cette journée riche en évènements, j'estimais avoir eu ma dose d'aventure pour au moins une semaine. J'observai la main de la jeune fille, toujours tendue, et son regard gris acier planté dans le mien. Mais en aurais-je assez pour toutes les années à venir ? Je pense qu'elle était à un cheveu de la retirer quand je lui serrai brusquement la main. Ses yeux s'arrondirent en même temps que les miens le temps que nous partageâmes ce contact. Intense, sans détour, nos esprits dénudés face à face, la communion transcenda mon âme. A la vitesse de la pensée, nous partageâmes tout : réflexions, émotions, souvenirs, sans pouvoir en maîtriser le flux. Des images inconnues pénétrèrent mon esprit. Je sentis remonter du fond de mon inconscient des choses que je me cachai à moi-même, sur le point d'émerger au clair entre nous deux... Le contact se rompit alors que je basculai en arrière, n'ayant plus une conscience de moi-même suffisante pour soutenir ma position assise. Tous les regards étaient braqués sur nous, une lueur d'inquiétude non feinte. Combien de temps cela avait-il duré ? Ce bref partage de pensées avait-il été prémédité ? Quoiqu'il en soit, si Alustriel avait déjà connu ce genre d'expérience avec d'autres personnes, je lus dans ses yeux, fixant l'infini, que ceci l'avait secouée tout autant que moi. Enfin, son regard s'anima. Quand il croisa le mien, une idée effleura la bordure de mon esprit : je suis Elladan Gil Celeb. J'eus alors la sensation qu'on ôtait un lourd fardeau de mes épaules ; m'allongeant sur le flanc, la tête vidée, je m'endormis comme une masse.
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